Marty Cagan à la School of Product. Quelle keynote !
Par Nils
- 5 minutes de lecture - 968 mots19 Octobre 2022, c’est jour de School of Product ! Encore une fois, ça frappe fort : Marty Cagan en keynote ! L’actuel “dieu”, “pape” du Produit, la personne du moment que l’on écoute dans la communauté Produit.
Ce jour-là, nous sommes confortablement installés dans les fauteuils matelassés de la grande de la Cinémathèque de Paris, nous ne le savons pas encore mais notre confort va bientôt être perturbé :D.
What a keynote !
Une keynote tellement bien structurée
En allant en keynote, de n’importe quelle conférence, j’attends de me prendre une claque, encore plus quand il s’agit d’un “ponte”. La claque vient souvent des messages véhiculés encore faut-il pouvoir les capter. Le plan adopté par Marty Cagan était facile à écouter, à digérer. C’était facile de reprendre le fil après une réflexion, une prise de notes ou une conversation avec soan voisin·e.
Point de folie dans ce plan, ni d’excentricité, de la simplicité. Simplicité n’est pas simplification et la simplicité c’est compliqué.
En négatif
Un plan articulé sur 10 misconceptions, 10 “non-conseils”, 10 “ne pas”. J’ai trouvé dans le choix de cette forme quelque chose de plus challengeant intellectuellement que d’habitude. Lorsque je lis un conseil, j’ai parfois le biais d’y voir une évidence, de ne pas réellement le prendre comme un conseil. J’ai trouvé la forme en négatif plus perturbante, elle a suscité plus d’écoute de ma part et généré une position plus humble.
J’en retiens quoi ?
Marty Cagan a eu ce talent de mettre des mots courts, clairs, précis pour parler de choses complexes et larges, des mots que l’on retient facilement. Certains d’entre eux restent encore présents dans ma tête. Comme une pellicule capturait l’instant que l’on souhaitait ne pas oublier.
Il en a cité 10, j’en ai retenu 3.
Day 1, day 2
Ma vraie révélation c’est cette expression “day 1, day 2”. Il y a des entreprises Day 1 et des entreprises Day 2.
J’essaie avec mes mots :
Dans la vie d’une entreprise, il y a ce premier jour, ces premiers jours. Vous prenez soin de vos clients et vous leur apportez ce dont ils ont besoin. Ca c’est le décor Day 1. Le Produit est au coeur des discussions.
Day 2 : autre ambiance. J’entends encore Marty Cagan dire “Bureaucracy” et laisser un blanc. Comme si tout était dit.
C’est quoi le décor Day 2 ? Beaucoup de processus ont cristallisés et ralentissent le système. Marty Cagan, en abordant ce concept, parle de “disease of process”, prononce les mots “painful”, “fear”.
Au final, ces processus, ces règles tuent l’innovation. Les discussions sur les Processus supplantent celles consacrées au Produit, sur ce que vous proposez à vos clients. Les personnes qui respectent les processus, les mettent en place sont promues, ceux qui parlent Produit, innovation, client ou utilisateur s’en retrouvent tristes et contraints de quitter ces structures pour retrouver un endroit plus prospice pour parler Produit.
Un exemple issu de la vie réelle d’une entreprise du CAC40 : Une équipe organise une journée d’ateliers, cette journée a lieu dans 8 jours. L’équipe s’aperçoit que la participation d’une personne aujourd’hui en alternance depuis plusieurs mois est indispensable. Problème ! La date de cette journée est 2 jours après la fin de son alternance. Des personnes contactent les services RH, expliquent la situation et entendent en retour “c’est impossible, on ne sait pas faire des contrats en moins de 1 mois et demi.”.
Lien direct vers ce sujet dans la keynote.
Des idées innovantes de produits ?
J’ai également retenu ceci : Résoudre un VIEUX problème avec une bien meilleure solution (que celles qui existent déjà) plutôt que d’innover sur de nouveaux problèmes.
Je m’explique : les produits qui marchent ne sont pas des produits qui essaient de résoudre un problème que personne n’a résolu avant. Ces produits, ceux qui marchent, résolvent des VIEUX problèmes avec des solutions bien meilleures que celles qui existaient.
Je suis dans un monde professionnel qui parle (trop ?) souvent d’innovation, de disruptivité. Il y a quelques semaines, à l’issue d’un atelier de travail en groupe sur l’étude et l’envie de refonte d’un processus, une des personnes me disait, un peu déçue, “nous n’avons pas été très disruptifs”. Comme si c’était un attendu. Comme si il fallait innover tous les jours.
Mais non, je n’attendais pas de disruptivité, d’innovation. J’attendais que les personnes prennent connaissance, conscience du processus existant dont elles font partie, d’identifier quelques irritants notamment ceux liés à la non-adéquation Produit / Marché. Au final, après un 2e atelier, elles ont réalisé qu’elles écoutaient trop peu leurs clients et elles ont décidé d’aller faire des interviews utilisateurs dans les prochains jours. Pour cette équipe d’experts, c’est une révolution.
Résoudre un VIEUX problème avec une meilleure solution.
“valuable, usable, feasible, viable” - Marty Cagan
Tomber amoureux·se de votre problème
Parmi vous, combien travaillent dans un environnement qui pense que la solution, le produit va rencontrer le succès alors qu’elle est déjà en production depuis plusieurs années et qu’elle ne marche pas très bien ?
C’est ma dernière épiphanie de cette keynote : ne pas tomber amoureux de sa solution mais de son problème. Et donc ne pas itérer sur SA solution (chérie ?) jusqu’au succès.
L’équipe d’ “experts” que je mentionnais plus est amoureuse des solutions qu’elle imagine. Ils en sont persuadés et pourraient vous l’expliquer de manière très scientifique. Oui mais ces solutions ne trouvent pas souvent preneur pour tout un tas de raisons (coûts de mise en oeuvre, timing trop en avance, …). Le fait qu’ils aient décidé de faire des interviews va plus les confronter aux problèmes et un peu les éloigner de leurs solutions.
Un grand merci à l’équipe d’organisation de la School of Product de nous permettre de vivre des moments comme celui-ci. C’était géniel.
Bibliographie
- Vidéo de la fameuse keynote